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De la Patagonie à l'Alaska

11 mars 2018

Alaska : the last frontier

Septembre 2017

D'un bout du monde à l'autre : 700 jours et 75'000km nous séparent de notre première journée d'autostop à Ushuaïa.

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Derniers tours de roues sur le continent américain...

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Le parc national du Dénali, la montagne qui lui doit son nom et les habitants de la tundra.

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P1240074C'est l'ouverture de la chasse, n'en déplaise aux caribous!

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P1230786Ce n'est que la réplique utilisée pour le film, mais fouler les pas de l'infortuné Christopher McCandless est une expérience émouvante.

P1240249La partie émergée de l'iceberg : derrière cet imposant glacier se cache le plus grand champ de glace non polaire au monde.

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11 mars 2018

Yukon, Alaska et Territoires du Nord : welcome into the wild

Juillet - août 2017

Première entrée en Alaska : un rêve parmi tant d'autres réalisé durant ce voyage.

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 Après avoir intégré à notre périple environ 2000km de singletracks, nous remisons (provisoirement) nos montures pour nous mesurer à la Dempster Highway, piste de 1600km aller-retour au gravier sans pitié qui traverse successivement la tundra, la taiga et la forêt boréale. Il nous faudra rouler jusqu'aux confins du continent pour retrouver l'ambiance sauvage et isolée des immensités désertiques de la Bolivie ou du Chili.

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P1220675Pffff, même pas jaloux!

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P1220483Inuvik, le point le plus septentrional de notre périple, à quelques encablures du détroit de Beaufort. Terre des Inuits qui ont franchi, à l'instar de tous leurs cousins amérindiens, le détroit de Bering il y a environ 30'000 ans.

P1220501Seul le village de Tuktoyaktuk, encore plus au nord, uniquement atteignable par avion ou par voie fluviale, a conservé son mode de vie ancestral. Plus pour longtemps, un accès terrestre étant prévu tout soudain. Les pick up sonneront le glas de cette culture, apportant dans leurs sillons désoeuvrement et alcoolisme.

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P1220519 (2)Non, ce n'est pas la Roumanie mais bien le Canada!

P1220577 (2)Terre des loups, grizzlis, élans, caribous, ours polaires, boeufs musqués, aigles à tête blanche ou encore chèvres des montagnes à poil blanc. Il faut pourtant de la chance pour les débusquer, encore davantage pour les photographier (ci-dessus un boeuf musqué ; ci-dessous un élan).

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P1220634Campement d'hiver d'un chasseur-trappeur solitaire du peuple Gwich’in qui occupe la tundra arctique avec les Inuits. Dans l'attente des caribous en migration de l'Alaska. Bientôt il fera -50 degrés et les nuits dureront 24h. Les loups et les ours pour seule compagnie...

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 Dawson City : un patelin qui, comme tant d'autres dans l'Ouest nord-américain, ne doit sa naissance qu'au goldrush de la fin du XVIIIème et sa pérennité qu'au tourisme actuel.

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 Les oursons ont intérêt à aimer le saumon s'ils entendent passer l'hiver...

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11 mars 2018

From the Rockies to the Jurassic Forest

Juin - juillet 2017

Les Rocheuses
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 North Vancouver et Ile de Vancouver

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 Squamish

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 Whistler

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 Jasper

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11 mars 2018

Il était une fois dans l'Ouest

Mai 2017

Dans l'époustouflant Ouest américain, les images sont suffisamment éloquentes pour se passer d'un long panégyrique. On fera donc l'économie de longs discours dans l'exposé de nos dernières aventures.

Yosemite, Sequoia Park et Death Valley : les paysages se suivent mais ne se ressemblent pas

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Sedona et Flagstaff : en territoire apache

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Grand Canyon et Horseshoe Bend

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Bryce et Red Canyon : aux trousses de Butch Cassidy

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Zion : Pélerinage chez les Mormons

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Monument Valley : Western et spaghettis chez les Navajos

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Canyonland : sur les traces des premiers riders de l'Ouest

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Moab : Let's slickrock!

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Colorado : Ruée vers l'or...blanc

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Grand Teton et Yellowstone : au pays de Yakari

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11 mars 2018

And the new president of the United States is...

Avril 2017

Côte Ouest

Notre roadtrip au coeur de l'Ouest américain commence par la visite du Joshua Tree National Park aux confluents des déserts du Colorado et de Mojave, avant de rejoindre Los Angeles. C'est un sentiment singulier de déambuler dans les rues de la Cité des Anges... et des stars, une rupture avec l'Amérique latine brutale, presque sans transition. Venice, Newport Beach, Melrose Place, Beverly Hills, Malibu, Bel Air, Mulholland Drive, autant de quartiers aux consonnances cinématographiques mythiques (mais au mérite discutable) que nous parcourons depuis notre camp de base au pied de la colline d'Hollywood.

C'est dimanche et donc jour de promenade (ou plutôt de parade) à Beverly Hills. C'est l'heure de la sortie pour les toutous comme pour les Ferrari et autres Lamborghini. Ici comme à Hollywood, luxe et mauvais goût rivalisent d'ostentation jusqu'à ne faire qu'un. Tout est bien irréprochable dans ce quartier résidentiel pour milliardaires, si ce n'est son absence totale d'âme qui semble se plaire davantage downtown.

Nous rejoignons ensuite le bord de mer par la route 66 qui prend fin dans la pier (jetée) de Sant Monica. Après un passage éclair à Venice Beach que se partagent surfeurs, skateurs sexagénaires et autres spécimens plus exentriques les uns que les autres, nous atteignons Malibu à la nuit tombante. Ni Pamela ni Mitch Buckanon font parti du comité d'accueil sur la plage mais un cortège de dauphins et de baleines nous honnorent de leur présence.

A la recherche d'un spot pour la nuit en bord de mer, nous apprenons que nous sommes à Malibu Road, quartier disons...cossu où sont domiciliées nombre de stars, et que nous avons élu domicile devant la maison de Tom Hanks. De là à se voir chaleureusement offrir le gîte et le couvert, il n'y a qu'un pas...ou deux. Nous ne sommes distants que de l'épaisseur d'un mur, mais pourtant un monde nous sépare. La réalité se révèle en effet un brin plus prosaïque et c'est du sempiternel riz-poivrons dans le van dont nous nous subsantons et nous contentons. Malgré tout, résider - le temps d'une nuit certes - dans le même quartier que les plus grandes stars d'Hollywood est une expérience plutôt sympathique. Pour plus de détails sur cet épisode croustillant, le lecteur est renvoyé à son magazine people préféré.

Nous longeons ensuite le sublime littoral par la Pacific Coast Highway, originellement Camino Real. C'est en effet par ce chemin que conquistadors et missionnaires en quête d'Indiens à convertir ont atteint la Californie. Dans un registre plus prosaïque, c'est également sur cette route qu'ont été tournés les multiples volets de Fast and Furious, entre autres chef-d'oeuvres du 7ème art.

Elle nous conduit à Santa Barbara, autre localité au nom évocateur. Après une rapide visite de la mission franciscaine du XVIIIème siècle, nous prenons de la hauteur et cheminons à travers prairies et vignobles qu'occupaient jadis les indiens Chumash et que se partagent à présent les fortunés propriétaires de ranch. Nous traversons en chemin le village danois de Solvang et Santa Inez, patelin à l'architecture western archétypique. Littoral (étonnamment) très sauvage avec ses surfeurs et ses fishermen et collines verdoyantes avec leurs farmers se donnent la main et progressent conjointement vers le nord. L'un et l'autre bénéficient d'une douceur de vivre exceptionnelle et profitent d'un certain hédonisme (il fait beau 315 jours par an et la région semble imperméable aux diverses crises économiques). En Californie, tout n'est que luxe, calme et volupté comme dirait l'un; amour, gloire et beauté comme dirait l'autre. Carmel, la prochaine bourgade sur notre route, repère de milliardaires mais aussi d'artistes et d'écrivains dont Clint Eastwood fut pour un temps le maire, ne déroge pas à la règle. De là, la superbe 17 miles Drive serpente tantôt dans une forêt de cyprès entre manoires et greens de golf les plus sélects au monde, tantôt au bord des falaises lacérées par les vagues que se partagent phoques et lions de mer. Elle nous mène à Santa Cruz, ville un peu plus alternative et à l'atmosphère assurément moins guindée, berceau de la célèbre marque de planches à roulettes et de VTT éponyme et d'O'Neill. C'est surtout ici que l'aventure du surf a débuté, après avoir été importé d'Hawaï. Nous visitons le petit musée du skateboad, le temps d'un sympathique échange avec son manager, à l'orignie avec Tom Sims et Jack Burton, des premiers snowboards en bois et figurant dans le documentaire Lost of Dogtown retraçant l'histoire du skate.

Nous ne sommes plus qu'à quelques encablures de San Francisco que nous atteignons après une petite halte à Maverick et sa vague géante mondialement connue des surfeurs qu'un seul d'entre eux a osé défier avant les années 90 ainsi qu'au phare de Pigeont Point. La brume épaisse et la pluie battant le flanc des falaises rajoutent un caractère hostile à des terres déjà bien austères. Nous imaginons ce que devait ressentir les baleiniers portugais du XIXème ou les contrebandiers de la Prohibition un siècle plus tard dans leurs navires aux prises avec la tempête.

Nous visitons San Francisco avec tout l'intérêt qu'elle mérite, mais davantage encore que la ville elle-même, ce sont les moments partagés avec Valérie, ancienne collègue et actuelle expatriée et son mari Ozgür qui font tout l'agrément de ce séjour. C'est aussi un instant majeur du voyage pour Guillaume puisqu'il se fait cadeau d'un nouveau VTT. Enfin! Il est grand temps à présent de partir à l'assaut des singles tracks de l'Ouest américain et canadien! 

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11 mars 2018

Zapata, Tequila...et Coca Cola

Janvier - mars 2017

Sud du Mexique

Au Yucatan - qui pour l'anecdote signifie "Je ne comprends pas", réponse d'un Maya à l'explorateur Cordoba qui lui demandait où il avait accosté -, l'industrie du tourisme atteint des sommets, ou touche le fond, c'est selon. Dans ce vaste pandémonium, se trouvent catalysés des valeurs qui ne dépassent les soubassements de l'âme, les ressorts les plus viles, les turpitudes les plus ineffables, la morale la plus triviale. Autant d'inclinations vers l'un ou l'autre cercle des enfers d'Aliegeri. 
- Peu nous en chaut de ces investisseurs amerlocs sans scrupules, de ces politiciens mexicains infâmes et véreux et de ce tourisme inconscient !
- Tout à fait d'accord!, serait-on tenter de répliquer, si la cupidité et l'absence généralisée de conscience morale n'était pas entrain de détruire la deuxième plus grande barrière de corail et à travers elle le genre humain. On ne peut que rejoindre Renaud qui rabache depuis un petit bout de temps déjà qu' "ils vont polluer toutes les plages et par leur unique présence abimer tous les paysages".

Propos confirmés par le spectacle désolant de la barrière d'ordures qu'il faut franchir avant d'apercevoir celle de corail. De guerre lasse, l'ancienne Riviera Maya (basura ou americana - tous deux synonymes dans toutes les acceptations du mot ordure – seraient plus appropriés aujourdhui) et ses villages de pêcheurs isolés, considérée autrefois comme l'une des plus belles de toutes les Caraïbes, abandonne ses joyaux aux avides investisseurs privés, détruisant du même coup le fragile écosystème mais aussi l'équilibre social. Les ouvriers exploités entre deux périodes de grand désoeuvrement forment des ghettos en bordure des luxueux complexes qu'ils ont construits. Le vent du capitalisme le plus inique et de la décadence la plus abjecte n'a pas fini de souffler en Amérique latine comme ailleurs.
Mais allons, essayons de fermer les yeux devant le visage ideux de ce tourisme immonde, de s'en foutre de ce monde qui va de guingois ! La taille outrancière des resorts nous permet de nous fondre dans la masse des vacanciers et nous jouissons allègrement de toutes leurs prestations. Notre désir d'assimilitation ayant ses limites, nous renonçons à l'activité "bisous au dauphin" dans l'aquarium de l'hôtel qui clôt en apothéose le séjour à Disneyland - euh...pardon, au Mexique - du parfait touriste ricain. Pour le coup, les plages et l'eau d'un magnifique dégradé de bleus sont bien proprettes, presque aseptisées. Nous nous accommodons fort bien, au mépris de certains de nos principes faut bien l'admettre, de cette parenthèse balnéaire dans notre voyage.

Nous visitons ensuite les sites mayas de Tulum et Coba avant de rejoindre La Havane pour le nouvel an. Le contraste avec la délurée Cancun est saisissant. L'austérité des édifices (mais vraiment pas celle des gens!) ainsi que les automobiles sexagénaires nous plongent rapidement dans l'histoire d'un pays où passé et présent s'entremêlent plus que partout ailleurs. De la chute du régime de Baptista à la crise des missiles en passant par le débarquement manqué de la Baie des Cochons, tout cela sur fond de culte au Che, son idéal sociétal et sa haine de l'impérialisme américain ont façonné l'histoire contemporaine de toute l'Amérique latine. Malgré une propagande qui a survécu à la mort du lider maximò, un vent d'ouverture souffle désormais à travers les cheveux gominés de la jeunesse cubaine en direction des États-Unis. Sans rancoeur apparente contre l'héritage communiste, elle a le regard tourné vers l'avenir et les perspectives de changement, appel d'air auquel Castro frère semble consentir. Dans les assiettes, ce changement se fait attendre dans une fatalité sidérante. Nous sommes invités à prendre le café chez une femme qui revient d'une visite dans notre pays. Alors que nous nous attendons à trouver nos symboles d'orgueil patriotique dans l'album-souvenirs qu'elle s'empresse de nous montrer, ce sont ses meilleurs clichés des riches étalages de la Migros qu'elle nous présente, toute incrédule encore. Une véritable caverne d'Ali-Baba pour qui n'a qu'une ration mensuelle d'huile et de farine, une richesse du patrimoine qui passe pour les Cubains bien avant les montres et les montagnes.

Au retour, nous embarquons Laura à travers le Chiapas, entre villages coloniaux brûlés par le soleil où le temps se consumme à petit feu et hameaux d'indiens de la selva descendants des Mayas. Une image plus fidèle du pays que l'enclave américaine de Cancun. Entre autres attraits ici, les ruines mayas donc, mais aussi les cenotes, ces lacs souterrains qui servaient de réserves d'eau potable ou de lieux de rituels bien avant de nous offrir des occasions ludiques et bienvenues de rafraîchissement. 
Le gouvernement mexicain, qui n'est pas à une injustice près, ne reconnait pas la population indigène du pays, pourtant forte de 10 millions d'individus. Pis, en ouvrant son marché à l'Amérique du Nord, il les prive du commerce du blé indispensable à leur survie. Le mouvement zapatiste qui lui fait front pour obtenir le droit à la terre, à l'éducation, à la justice ainsi que la reconnaissance de leur culture fait pour l'heure choux blanc. En résulte une invraisemblable et révoltante situation : le maïs des tortillas mexicains est américain et transgénique, contraignant les indigènes dépossédés de leur seule source de revenu d'émigrer aux Etats-Unis. Dans l'indifférence du peuple comme du gouvernement.
Last but not least, les riches ressources en bois, minerais et pétrole de cet état, grâce à ce même accord de libre-échange, sont entrain de faire les choux gras des entreprises pharmaceutiques et pétrolières américaines, sans aucune considération évidemment pour les habitants de ces terres. C'est toutefois à Coca-Cola que revient la palme du révoltant. Alors que le sud du pays voit ses réserves en eau s'évaporer, la multinationale pompe annuellement dans son sous-sol des millions de litres pour son seul besoin. Comble du sordide et du cynisme, la production et le commerce local de cette boisson, préférée à l'eau qui de toute façon fait cruellement défaut, sont ici une des rares perspectives d'emploi. Par le truchement d'un argumentaire hypocrite et spécieux et grâce à leur empire sur ces populations sans autre ressource, la firme « offre » certes des emplois mais impose surtout des conditions de travail proches de l'esclavage. Le fait que la majorité des employés n'ait pas même le pouvoir d'achat suffisant pour s'offrir le bien qu'elle produit l'illustre plutôt bien. Ainsi la présence américaine ne sert que ses propres intérêts et ceux d'une élite dirigeante prévaricatrice et complice, tout en pillant le sol et appauvrissant la culture indigène.

Nous retrouvons de manière inattendue entre les ruines de Palenque et la pittoresque cité coloniale de San Cristobal l'univers andins que nous pensions avoir quitté pour de bon au Guatemala. D'ailleurs la ville ressemble à s'y méprendre à Antigua. Les innombrables topes, dos d'ânes plutôt hauts en couleur qui agrémentent la traversée de ce relief montagneux ont comme seul avantage de nous laisser le temps de s'imprégner de cette atmosphère mi-andine mi-grand-nord canadien. Cette région est également le bastion du mouvement zapatiste. Nous aurons loisir d'en apprendre plus sur leurs revendications lors des nombreux barrages d'un itinéraire des plus pittoresques. 
La région du Chiapas, à l'instar de l'altiplano guatémaltèque, à tous les traits du Pérou, des paysages au folkore, en passant par l'extrême pauvreté. La visite des villages tzotziles aux alentours de San Cristobald est un véritable coup de coeur et la visite de l'église de Chamula un temps fort de notre voyage. Le syncrétisme y est à son paroxysme et l'ambiance mystique qui y règne est aussi vibrante et fervente que dans un monastère bouddhiste. D'ailleurs, ici le syncrétisme tourne à l'avantage des rituels mayas puisque le dernier curé a déserté l'église en 1867 et que l'évèque n'est autorisé à en franchir la porte qu'une fois l'an. Ce sont en effet les rites chamaniques qui prévalent. Les saints et les symboles chrétiens côtoient donc le culte des esprits et des mythes. Ainsi les cloches sont à même le sol, les bancs sont retirés. Sur le parterre recouvert de milliers de bougies, l'on chasse les mauvais esprits en génufléxion dans une robe de laine grossière en psalmodiant, crachant le posh - un puissant alcool local (de plus en plus remplacé par du Coca) - tout en reproduisant une gestuelle sacrée une poule dans les mains. Impressionnant et émouvant à la fois! Il faudra toutefois se contenter de cette seule description car ici les appareils photos ne sont pas les bienvenus. Cette présence impudente et impudique dans leurs incantations provoque en nous un tel malaise que nous nous serions de toute façon bien gardés de les immortaliser.
Toutes les communautés sont en fête en ce début d'année et nous assistons à autant de cérémonies que nous traversons de patelins. A Chiapa de Corzo, nous avons la chance d'assister à la Feria Grande, organisée en l'honneur de quelque saint où l'on défile plusieurs jours durant entre fanfares et danses pour lui faire offrande. Parmi les danseurs, un groupes d'hommes travestis nous interpellent. Il ne s'agit nullement de quelque provocation blasphématoire mais d'une coutume qui veut que le benjamin d'une fratrie soit élevé comme une fille. Dans bien des cas, on le conçoit aisément, ce dernier change de bord. Ce qui pourrait sembler invraisemblable dans un pays si catholique n'a ici pourtant absolument rien d'extravagant. 
De la myriade de saints vénérés et célébrés – et qui d'ailleurs volent la vedette à Jésus – la vierge de la Guadalupe est celle à qui l'on voue la plus grande ferveur. Les Espagnols ont fait montre d'une grande sagacité lors de leurs campagnes d'évangélisation en la représentant à l'image des natifs, à savoir bistrée afin de faciliter leur conversion. Une foi trop éblouissante empêche encore de nos jours les croyants de réaliser qu'ils doivent à cet efficace pragmatisme leur attachement à cette idole. Il faut dire que côté instruction, dans ces patelins reculés où le régent vient dispenser son maigre savoir à dos de cheval quelques mois par année, on est proche de l'enseignement du XIXème siècle dans nos profondes vallées latérales.

Nous changeons ensuite de registre, d'ambiance et de décor et rejoignons la côte pacifique, de Zipolite, ses eaux transparentes où foisonnent baleines et dauphins et ses sublimes plages peuplées seulement d'une poignée de nudistes hippies à Puerto Escondido, qui peut se prévaloir de figurer parmi les trois meilleurs spots de surf au monde. D'ailleurs, après force pocrastination, nous nous décidons enfin à faire le baptême de la planche. Peut-être aurions-nous préféré voir surfer les professionnels sur les plus grosses vagues du monde, mais comme ce n'est pas la saison, c'est à nous parfaits débutants qu'il revient d'occuper le spot. Audrey a toutefois un peu malgré elle trouvé la parade. Une grosse fièvre la prive de toute activité. Le soir, nous revivons nos prouesses de la journée tout en se délectant d'un mojito devant le spectacle onirique du coucher de soleil. Certainement le meilleur moment de la journée.
Puis nous poursuivons nos pérégrinations dans la région d'Oaxaca. Plus encore que la visite de la ville coloniale et de sa cathédrale au plafond chamarré, c'est celle des villages aztèques et zapotèques qui parsèment une plaine aride digne d'un décor de western qui nous enchante. Nous y retrouvons un couple d'anciens hippies québécois rencontrés à Zipolite avec qui nous nous étions bien marrés. C'est l'une des rencontres marquantes de ce voyage, de celles dont on repart plus riches qu'à notre arrivée. Merci Michel et Julie pour ces échanges passionnants ! Une expérience métaphysique que nous fait vivre leur voisin mexicain, mi-chaman mi-Léonard, conclue de manière plutôt déroutante cette retraite spirituelle inattendue.

Laura ayant fait son temps à nos côtés, c'est seuls que nous reprenons la route vers l'intérieur des terres après un dernier wildcamp à Hierve de Agua.

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Nous faisons à présent cap sur Quéretero, où sont prévues les retrouvailles avec notre ami mexicain Ulises qui séjourna quelques temps Rue St-Ours 11. En chemin, nous visitons un sanctuaire de papillons monarques (ceux des étiquettes des bouteilles de sirop Morand) dans les forêts d'altitude du centre du pays. Ce n'est pas exactement ici que nous pensions éprouver nos plus grosses doudounes et nos sacs de couchage -40° mais nul doute que la nuit nous serait apparue un peu plus longue sans ces deux expédients. Pour peu, nous nous croirions déjà au Canada. Nous contemplons au réveil la myriade de papillons tantôt virevoltant en solitaire tantôt mettant à profit leur nombre pour se réchauffer mutuellement, agglutinés sur les troncs d'arbres qu'ils recouvrent presque intégralement. Un spectacle plus onirique qu'excitant...     

Nous reprenons ensuite la route et cheminons à travers la campagne émaillée de champs de blé couleur fauve. L'ardente générosité du soleil s'apparente  dans ce coin de pays davantage à de l'acharnement. Les maisons de briques en construction temporairement suspendue ou à jamais inachevées – question qui nous occupe encore à ce jour – témoignent du grand désoeuvrement des habitants des patelins que nous traversons. La poignée d'hommes restée au village s'accroche à un ultime espoir de bonne fortune en dilapidant leur maigre pécule dans la machine à sous de l'unique deposito (estaminet local) de la communauté.
Nous retrouvons enfin Ulises après l'avoir quitté à Branson presque trois ans plus tôt. Le plaisir de ces retrouvailles n'a d'égal que l'accueil qui nous est réservé par sa famille et son amie Miriam. Il n'est pour sûr pas meilleurs amphitryons que les Latinos! Nos deux cicérones nous emmènent le temps d'un week-end à la découverte des pueblos magicos de San Miguel de Allende et de Guanajuato avant de prendre congé autour d'une fondue fort réussie malgré l'absence de l'estampille AOC du gruyère.

Nous nous empressons à présent de rejoindre la péninsule de Basse-Californie, que les voyageurs laudatifs n'ont de cesse de porter au pinacleL'itinéraire pour Mazatlan d'où nous embarquons nous fait passer par Tequila et ses champs d'Agave à qui il doit, comme le Mezcal que l'on rencontre plus au sud, ce puissant breuvage. Dans ce pays plus que dans tout autre, nous devons tenir compte du degré de sécurité et du climat social de chaque région dans la planification de notre itinéraire. Ainsi, nous éludons soigneusement certaines portions du centre et du nord du pays. Dans cette zone, même les curés, plus patibulaires que dévots usent du révolver dans des joutes entre narcotraficants, l'obole dans la soutane plutôt que dans les poches dégarnies de leurs ouailles. Cette autre réalité que celle de notre récit, nous nous gardons bien de l'approcher.
Après avoir scrupuleusement suivi ces précautions, nous embarquons donc pour La Paz. La présence à bord de notre petite maison roulante (flottante pour le coup) au beau milieu des 40 tonnes met peut de temps à attiser la curiosité de leurs propriétaires qui un à un finissent par nous encercler et nous mitrailler de questions. Intérêt particulier pour le récit de nos aventures ou par la présence de la seule femme à bord, on ne le saura jamais...

La côte qui s'efface et qu'un horizon infini et uniforme remplace mais aussi l'invasion d'une armada américano-canadienne de RV's (pour recreative vehicle) dispendieux venus fuir l'âpreté de leur hiver préfigurent la fin de notre périple en Amérique latine et le teignent d'un sentiment contrasté de mélancolie et d'excitation. Etonnant que cet appendice n'ait pas rejoint la Californie, le Nouveau-Mexique, l'Utah, le Colorado, le Nevada, l'Arizona et enfin le Texas au rang des terres mexicaines conquises par l'Union au XIXème siècle. Heureusement, ces sympatiques snowbirds (ainsi qu'on les nomme ici du fait de leur migration) semblent d'un autre atavisme que leurs concitoyens de Cancun, ce qui permet à la prequ'île d'être surprenamment bien préservée en dépit de sa proximité potentiellement dévastatrice avec son voisin tant friand de parcs d'attraction.
La découverte du littoral débute par un remake du désert du Lipez en Bolivie : première plage, premier enlisement. Force est d'admettre que nous n'en avons pas tiré les leçons! L'irrésistible attrait de ces nuances de verts que confèrent à la mer son lit d'émeraudes, de jades et d'opales a raison de notre intention de précaution originelle. Nous sommes bien vite sanctionnés de cet excès de témérité: le piège se referme sur nos tentatives désespérées et vaines. Il faudra l'intervention d'un charitable 4X4 pour nous départir de notre inexpugnable détresse. Prendre son petit-déjeuner avec comme décor l'aquarium du monde (pour reprendre les mots du célèbre commandant au bonnet rouge) est un luxe qui ne s'offre qu'au prix de chemins d'accès captieux et donc au risque d'une issue fâcheuseMais qu'est-ce qu'un luxe sans sa rareté, sinon une banalité? Après un mois à écumer l'isthme, las des plages et des cactus, repus de ces colosses des mers (est-ce seulement possible?), nous nous rapprochons de la frontière et de ses portes ouvertes pour les uns ou de son mur (presque) hermétique pour les autres.

Loin de l'image d'Epinal véhiculée par le cinéma, les sergents Garcias siestant à l'ombre de leur sombrero, jouant tantôt de la gachette tantôt du guitarron quand ils ne se désèchent pas le tuyau à la Tequila sur fond de cactus sont plutôt rares. Mais entre histoire et culture millénaires, architecture coloniale, faune marine pléthorique et spots de surf de classe mondiale, le Mexique, par sa diversité, ne saurait laisser quiconque le visite indifférent. Et de fait, ce pays nous l'avons adoré! 
A la tristesse du coeur de quitter une culture de laquelle nous sommes à présent si imprégnés se mêle le soulagement de l'âme de se défaire d'une pauvreté récurrente et tenace. Loin de se présenter sous la forme d'un chiffre ou d'une image télévisée, ici la misère a un visage duquel il est difficile de se détourner, un regard implorant qu'on ne soutient sans un certain malaise ou frustrant sentiment d'impuissance quand on souffre d'excès d'empathie. Malgré tout, c'est le sourire qui prédomine sur le visage de l'Amérique latine. Et c'est un peuple allègre, chaleureux, généreux, d'une gentillesse et d'un sens de l'hospitalité sans équivalents dans notre bonne vieille Europe du Nord que nous laissons à regret derrière nous.

Au terme de ce périple en Amérique hispanophone, c'est paradoxalement notre vision des Etats-Unis qui s'est trouvée bouleversée. En nous penchant sur l'histoire commune de ces pays, c'est en effet simultanément celle, indissociable mais malheureusement souvent peu glorieuse et édifiante des Etats-Unis qui nous est apparue. Un véritable coup de massue sur notre perception occidentale sinon candide, biaisée d'un pays qui, dans sa vision manichéenne du monde, a mis au cours du XXème siècle ici comme ailleurs autant d'énergie à renverser les démocraties bourgeonnantes et, dans sa haine viscérale et sa peur paranoïaque, à ternir l'image de l'URSS que pour cacher à grand renfort d'arguments fallacieux mensonges, manipulations, conspirations et répressions tout en s'ingéniant à se donner une image bucolique pour le moins spécieuse. A tel point qu'il est à se demander si l'Empire du Mal ne se situe pas un peu plus à l'ouest sur la carte qu'on nous l'a appris. Force est de constater cependant que ce n'est pas la dictature du marteau et de la faucille qui a fait couler le sang de la liberté d'expression et du pacifisme sur leur continent et que la Russie de Gurbachev fut par moins belliqueuse que l'Amérique de Reagan! Autant de témoignages de l'Histoire qui écornent un pays à l'image parfois fallacieuse mais dans le même temps si fascinant et qu'il nous tarde de découvrir.

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11 mars 2018

Guatemala et Bélize

Décembre 2016

Guatemala

Nous voici donc au Guatemala, au coeur du monde maya. Il s'est développé entre le sud du Mexique, le Guatemala, le Bélize et le Honduras environ 1000 ans avant JC, supplantant les Olmèques, pour décliner avec l'arrivée des Toltèques et des Aztèques puis s'éteindre sous le joug des Espagnols. L'histoire récente du pays, que la providence n'épargne pas davantage que ses voisins, peut se résumer ainsi : indépendance, république bananière, dictature, oligarchie, junte militaire, guérilla communiste, coup d'Etat fomenté par les USA, guerre civile, exactions, massacre et instrumentalisation des Indiens, corruption, narcotrafic, stabilité précaire. Autant de fertilisants à un paupérisme tenace.
Malgré 500 ans d'acharnement, de nombreux descendants des Mayas occupent encore certaines régions du pays, constituant la plus grande communauté indigène d'Amérique centrale. Ils ont su conserver leur culture, leurs langues vernaculaires et leurs traditions. Côté religion, ils ont mêlé leurs anciens rituels au dogme catholique, donnant lieu à un syncrétisme original. Leurs représentations les plus prégnantes demeurent toutefois celles de leurs ancêtres, qui s'identifiaient à "l'homme de maïs", proches de la terre et donc tributaires des sautes d'humeur de mère nature. Les caprices de cette dernière expliquent en partie la grande précarité actuelle de ces communautés. Leurs costumes et leurs marchés chamarrés sont envers et contre tout les plus fleuris d'Amérique centrale, à tel point qu'il suffit d'imaginer la présence des lamas pour se croire en pays inca! On se demande même si le Guatemala ne s'est pas égaré en chemin. Pour sûr, cette extension du Pérou dans les Caraïbes tombe à point nommé pour contrer notre nostalgie naissante des Andes !

Nous choisissons notre premier point de chute un peu au hasard, à Monterrico en l'occurrence, au bord du Pacifique. Nous passons la nuit dans un centre de protection des tortues marines. Ici, on récupère les oeufs des femelles venues pondre sur la plage afin de les protéger jusqu'à leur éclosion. 
Mesure plus que nécessaire lorsque l'on sait qu'un nouveau-né seulement sur mille devient adulte. Tandis que nous louons la quasi dévotion de leurs protecteurs, tout attendris par ces créatures si vulnérables, des locaux, aussi peu sensibles à cette cause que conscients d’être les premiers concernés, font crânement la course au volant de leur quad.
Nous découvrons ensuite la ville coloniale d'Antigua, combinaison des venelles et de l'ambiance de Cuzco, de l'architecture de Cartagène et de la Plaza de Armas d'Arequipa. Elle s'est vaillamment relevée de deux séismes essuyés au XVIIIème qui avaient enseveli la capitale qu'elle était à cette époque. Les Espagnols l'ayant ensuite sagement déplacée, elle a pu conserver de très beaux restes. Nous allons aussitôt souper chez Christophe, un restaurateur vaudois qui propose des plats bien de chez nous. Un moment attendu depuis un certain temps déjà! Pour le coup, il n'est point question de modération et la généreuse fondue suivie de l'incontournable sorbet poire william (de chez Morand) nous vaut quelques coliques contre lesquels le bicarbonate s'avoue vaincu.
C'est donc l'estomac encore en état de choc après des mois d'un mono-régime à base de riz que nous partons à l'assaut du volcan Acatenango. Nous grimpatzons jusqu'à 3800m, altitude du bivouac. L'idée est d'assister au spectacle nocturne de l’éruption de son voisin le bien nommé (ou pas) Fuego. Manque de chance, coquin de sort, il a fallu qu'il ferme ses vannes - à dessein serait-on presque tentés de croire - peu avant notre arrivée. Guillaume digère cette déconvenue, c'est bien sûr une tautologie de le dire, avec philosophie. Pour les photos du volcan dans toute sa splendeur et furie, nous sommes donc comme nous contraints à une recherche sur l'Internet. 
Le lever de soleil, auxquels nous assistons emballés dans nos sacs de couchage (mazette, il fait une cramine en là!) vaut heureusement à lui seul le détour. Il réveille au passage chez Guillaume des réminiscences empruntes d'émotions de l'ascension du volcan El Teide aux Canaries avec les copains, quelques années plus tôt.

Au lac serti de volcans d'Atitlan, nous visitons les villages indiens qui le bordent. Les uns sont spécialisés dans la céramique, les autres dans le tissage. Toujours, nous retrouvons ces positions et ces gestes millénaires. Le marché de Solola, qui en possède tous les linéaments, est d'un pittoresque à rendre jaloux ses confrères andins. Les femmes, pas tout à fait callipyges et qui atteignent sur la pointe des pieds le nombril de Guillaume, jouent des coudes (bien placés) pour se frayer un passage dans une foule dense, ouvrant la route à leur mari, cow-boy par leur chapeau, indien par leur costume. Agiles et fluets comme des cabris, forts comme deux mules, les hommes portent sur le dos à la seule force du cotzon des charges qui les dissimulent totalement. 
Nous sommes les seuls gringos et ce qui n'était en Suisse rien moins qu'un supplice pour Guillaume devient son attraction number 1 dans ce périple. Nous laissons sans grand regret de côté les villages annexés par les néo-babas-cool-bobos à la tête du très lucratif business "hippie". Les cours de danse transcendale, de reiki et de médiation zen, ce sera donc pour une autre fois.

Nous poursuivons notre pèlerinage des marchés en territoire Ixil, région montagneuse et reculée peuplée d’irréductibles indiens. Les Espagnols n’étant pas parvenus à soumettre ces inexpugnables habitants par les armes, ils ont chargé des missionnaires de le faire par la foi. Comme partout depuis en Amérique latine, la religion est ici omniprésente. Chemin faisant, une fête villageoise titille notre curiosité et nous décidons de nous arrêter. Il s'agit d'une cérémonie évangélique de bénédiction d'un dépôt de denrées alimentaires. Où comment unir le prosaïque au céleste. Nous arrivons en plein concert et c'est bien malgré nous que nous volons la vedette aux musiciens. Une bonne centaine d’ouailles se tournent vers nous simultanément, interdits pour les uns, amusés pour les autres. Nous partageons avec les enfants ce même sourire gêné. Heureusement, des hommes préposés à la popotte nous invitent cordialement à nous asseoir et insistent pour nous offrir le couvert. Des convives téméraires entreprennent même la conversation, tout curieux. Conversation bienvenue car l'ambiance est des plus étranges. Tout le monde reste assis, dans un silence quasi religieux. C'est un dépôt que leur piété a transformé en cathédrale. Loin de nos bacchanales et de nos coutumes païennes (paillardes ?), ici ni la bière ni le vin ne coule à flot. Il ne semble d'ailleurs y avoir aucun substitut à l'alcool pour délier les langues. Nous retrouvons parmi ces gens cette gentillesse spontanée et cette affabilité contenue car teintée de respect. Cette générosité désintéressée des individus les plus simples et les plus indigents (ou alors des Évangélistes? Cf. article En terre mapuche) est dans notre voyage, amplifiée encore par son côté inattendu, une récurrence qui ne manque pas de nous émouvoir. Nous déplorons toutefois profondément l'intolérance de ce mouvement de plus en plus répandu en Amérique latine à l'égard des religions primitives, qualifiées de paganes et d'idolâtres. Si leur Eglise était un ange, il lui manquerait ses ailes...

A Chichitenango, c'est l'église d'un blanc immaculé qui attire tout de suite notre attention. Construite au début du XVIème siècle sur le socle d'un temple maya, elle atteint un syncrétisme parfait (bel oxymore). Les cultes mayas et catholiques (qui, lui, tolère les anciennes croyances) se sont superposés dans la brique et fondus dans les âmes. Les fidèles, enveloppés d'un voile d'encens, hiératiques, s'y recueillent suivant des rites précolombiens sur un rythme de tam-tam frénétique. On est plus proche d'Incas dans un temple bouddhiste que de pratiquants catholiques romains dans leur église.
C'est dimanche et chaque village de l'altiplano est en effervescence. C'est au marché de Santa Cruz de Quiché que nous prenons notre frugal almuerzo constitué de frijoles et de tortillas de maïs (évidemment).
Dans le pays en général, dans cette région en particulier, l’école est en état de délabrement. Mais peut-on seulement dire d'un édifice qui n’a jamais possédé la moindre brique qu'il est en ruine ? Peuples enchaînés au boulet de la misère et de l'ignorance : fatalité ou inertie intentionnelle, stratégique et insidieuse des gouvernements nationaux et internationaux ? Là où les églises (évangélistes en tête) sont plus nombreuses que les écoles, là où les enfants ne sont pas implicitement des élèves, là où prédicateurs et instituteurs sont à peine plus érudits que leurs assistance, ne sommes-nous pas amenés à entrevoir l'inavouable manipulation de quelque(s) coterie(s) occulte(s) ayant tout à gagner d'instruire le peuple de croyances plutôt que de savoirs ? Toujours est-il que la situation est aussi injuste que révoltante.

Nous retrouvons plus au nord les paysages humides plus typiques de l’Amérique centrale. Nous nous prélassons quelques jours durant sur les berges du lac turquoise de Peten Itza, non loin de Tikal. Nous chindons cette illustre citadelle maya. Le site fait partie de ces sites, dont le Machu Picchu est l'archétype, où nous nous demandons si nous y allons par réel intérêt personnel ou parce que le Lonely Planet a décidé que c'était un incontournable et que notre instinct grégaire résiduel parvient à nous en convaincre. Nous le classons dans la seconde catégorie et rendons visite à sa petite soeur Yahxa, nettement moins convoitée mais pourtant tout aussi jolie. 
Même interrogation et même réponse pour le Bélize. Nous enjambons donc ce pays du Commonwealth laissé à l'abandon et faisons notre entrée au Mexique.

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11 mars 2018

Amérique centrale : du Panama au Salvador

Octobre 2016

Panama et Costa Rica

A notre descente de bateau, nous prenons trois jours pour mettre de l’ordre dans les papiers du Panama…euh dans les affaires du véhicule qui s'est vu délesté d'une canne à pêche et de quelques outils (mais quel pouvait bien être le dessein du scélérat?). Comme le plus souvent dans les grandes villes, nous logeons à l'hostel. A cette occasion, nous retrouvons cette espèce singulière de voyageurs juvéniles qui nous avaient accompagnés jusqu'à l'acquisition bénie du van. Ces individus butors, outre leur absence de zèle dans l'entretien de la cuisine communautaire, semblent avoir oublié dans la bière et les effluves de leurs cigarettes soporifiques les raisons mêmes de leur présence ici, préférant parader dans la pataugeoire de l'auberge, lobotomisés par les basses de leur musique abrutissante qui tabasse nos tympans avec un incoercible acharnement. Un mal nécessaire donc que cette intempérance qui nous donne l'impression de participer bien malgré nous à Secret Strory.
Après une difficile séparation, nous visitons furtivement le Canal - Histoire oblige - avant de traverser le pays dans une relative indifférence. C'est au tour de la maman d’Audrey de nous rendre visite au Costa Rica et il nous faut bien le reconnaître, ce pays nous fait un tantinet davantage rêver que son voisin du sud.

C’est à Puerto Viejo que nous faisons notre première escale. En lieu et place d’un panneau de bienvenue, c’est un écriteau « Aceptamos Mastercard » qui nous accueille à l’entrée de cette petite bourgade. Par cet épigraphe laconique mais limpide, le ton est donné. Tout est exagérément onéreux. Pas étonnant, l’économie du pays est aux mains d'une coterie d'expats ricains qui, dans leur ruée vers l'or, n'ont pas manqué de trouver le bon filon. Paradoxalement, c’est l’ambiance reggae qui prédomine ici. En effet, la majorité des locaux sont descendants d’esclaves jamaïcains venus loisiblement (ou pas) y cultiver la canne à sucre. Nous trouvons une splendide plage isolée où nous établissons notre campement pour quelques jours, à l’abri des cocotiers. Cette véritable thébaïde nous invite à la détente et Guillaume est fort aise d’imiter son lointain cousin favori, le paresseux, qui sieste, oiseux, en dessus de lui. A la brune (à 17h), nous assistons, contemplatifs, au spectacle hypnotisant des puissants orages vespéraux. Dans un concerto ininterrompu de musiciens éclectiques, les singes hurleurs prennent le relais et nous bercent jusqu'au petit matin de leurs lugubres et gutturales envolées lyriques.
Saison des pluies oblige, il pleut. Beaucoup. Trop. De charmants champignons sont devenus nos par trop incommodants compagnons de route. Avec force résolution, Audrey part en croisade contre l’envahisseur.
Dépités mais non désespérés, nous nous mettons en quête de soleil au parc Cahuita, entre plages sauvages et forêts renfermant une belle biodiversité. C’est aussi ici que Guillaume apprend que sa famille s’est agrandie d’un petit Maurice. L’émotion ressentie nous fait envisager l’après voyage avec un certain enthousiasme… 
Puis nous quittons cette courte côte caraïbe pour retrouver la maman d’Audrey et explorer le versant pacifique. Ensemble, nous parcourons le littoral, du parc Corcovado au sud jusqu’à Playa Hermosa plus au nord. Entre explorations des forêts luxuriantes, farniente sur de sublimes plages au sable noir et lecture au bord de la piscine des hôtels (merci belle-maman !), les occasions de rencontres avec la faune locale foisonnent ! Aras, toucans, singes, dauphins, serpents parmi tant d’autres, tous se sont vus voler la vedette par l’énorme crocodile (le deuxième plus gros après son frérot du Nil) qui s’est invité à notre baignade. Moment d’épouvante qui fera de la piscine notre unique lieu de baignade par la suite ! La visite des canaux du parc de Tortuguero et du volcan Poas sonne le glas de ce séjour de luxe en famille.

Dans le gigantesque parc d'attraction qu'est le pays, les tyroliennes et les ECO-lodges, à l'instar des humains, espèce hybride entre l'âne, le mouton et la chenille processionnaire sont bientôt plus nombreux que certains animaux. C'est parfois (trop souvent) à se persuader que l'Homme, une fois paré de sa banane d'Homo touristicus, perd les facultés propres à son espèce. Le tourisme grégaire voire agraire (ne s'agit-il pas de moutons?) contre lequel nous crions haro mais auquel, soyons lucides, il nous arrive aussi parfois de participer, a un impact préjudiciable considérable sur ce formidable biotope. Un tourisme raisonné et responsable où les animaux jusque là serviles ne seraient plus au service d'un consumérisme débridé et qui servirait à l'inverse davantage leurs intérêts est-il possible, ou seulement souhaité? Peut-on aimer véritablement la nature et concourir dans le même temps consciemment à sa destruction?
La découverte et l'observation d'une faune et d'une flore si exubérante est une expérience dont il est difficile de se détourner mais, partant, cette expérience nous laisse un amer arrière-goût d'antropocentrisme.

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Novembre - décembre 2016

Nicaragua-Honduras-Salvador

Aussitôt entrés au Nicaragua, il nous faut revoir l'idée que nous avions de ce pays qui prend le Costa Rica comme sa muse en matière de développement touristique. A peine balbutiant, il en connaît déjà les mêmes excès et outrages. C'est d'autant plus déplorable et consternant qu'il paraît peu probable que cette manne profite à beaucoup sinon au régime népotique en place ou aux propriétaires d'établissements étrangers qui s'intronisent potentats hors de leurs terres. A chaque passage dans l'un de leurs hébergements ou restaurants, nous avons la désagréable impression que les employés locaux sont esclaves dans leur propre pays. Les grands complexes hôteliers où tout est inclus n'offrent ni retombées ni perspectives aux communautés locales. Pis, face à ce projet prométhéen de canal interocéanique en passe de voir le jour et qui ouvre la boîte de pandore, les indigènes s'indignent dans l'indifférence des dirigeants et des investisseurs, victimes impuissantes des innombrables dommages collatéraux (déforestation, destruction et renchérissement insupportable de leur habitat au profit d'aéroports et de complexes touristiques, salinisation des eaux douces et conséquemment disparition d'espèces endémiques). Ce tableau inique, loin de ne dépeindre que la situation du Nicaragua, nous rend un brin fatalistes à force de récurrences.

Le tourisme de masse ou l’exploitation des ressources naturelles semblent être les seuls possibles de l’essor des nations en développement. Ainsi, au lieu d’une prospérité durable qui pourrait éventuellement éclore d’un pari fait sur l’éducation, des projets générant des profits rapides et faciles défigurent des pays qui ont leur nature pour principal atout et attrait, faisant le lucre des élites. En découlent une perte irrémédiable de leur authenticité et par la même de l’intérêt d’y voyager. Mais on serait presque tentés d’être cléments envers ces gouvernements qui tirent avantages de concitoyens aussi oisifs d'esprit que dispendieux. Les populations, elles, sont en droit d'exiger un développement respectueux de ses richesses naturelles et une répartition juste des bénéfices.
Malheureusement pour le peuple nicaraguayen, le pouvoir est entre les mains du couple Ortega, anciens révolutionnaires sandinistes qui, plus opportuniste que socialiste, trouve sous ces oripeaux amis et soutiens aussi bien parmi les fidèles de Castro et des Farcs qu’au sein de grandes multinationales, et cela tout en luttant avec acharnement contre l'impérialisme américain depuis la période la plus mouvementée de la guerre froide. Cet homme probe comme on le voit, vient de se voir offrir un troisième mandat pour lequel il a fallu revoir la Constitution.
Malgré une velléité plus marquée que marquante de relever l’éducation, le pays est dans le domaine l'un des moins efficients au monde. Ici, on expectore sa pituite à loisir et plutôt plus que de raison. Mœurs locales exquises ou indicateur du niveau d'éducation?
De ce vote ressortent aussi bien le peu de scrupule et d'intégrité de ce président corrompu que le manque de lumières du peuple qui l'a réélu. Mais lorsque on ne possède rien, le plus petit acquis prend l’apparence d’une révolution, un don de Dieu dont Ortega est ici l’intercesseur. Il lui suffit donc d’un zeste de poudre aux yeux pour que le peuple devienne aveugle et se convainque dans une foi infaillible d’un proche avenir meilleur. En 2006, seuls 55% des foyers du pays étaient reliées à l’électricité. Quelques communautés raccordées plus tard, le voilà à nouveau au commande de cette république bananière, paré à poursuivre ses activités interlopes avec le diable capitaliste. Le pays, lui, reste dans un état misérable, à tous les égards. Les mendiants et impotents en nombre presque aussi important que les hordes de chiens étiques errants, grands pourvoyeurs d'insalubrité, sont des signes bien palpables de son niveau de précarité. Il faut d’ailleurs qu’il soit parti des tréfonds du néant (40 ans d’une dynastie de dictateurs stipendiés des Américains. Roosevelt dira, parlant de l'un de ses membres (sic), "He may be a son of a bitch, but at least it's our son of a bitch!") pour que le peuple ait pu voir dans les deux décennies de ce régime une quelconque élévation de sa condition. Mais l'actualité récente nous montre que d'autres peuples en apparence plus éclairés ne le sont point davantage, ne laissant pas aux pays sous-développés l'apanage de la cécité ou de la naïveté.

De ce voyage si propice à l'observation émerge en nous une sorte de désenchantement ou de désolation existentielle, source d'une abondante réflexion sur l'être humain, sa nature et son devenir. Sa paresse intellectuelle chronique, le vide qu'il tente de remplir par son arrogance et sa fatuité, son penchant pour le futile et le superficiel, son narcissisme pathologique, sa soif inextinguible de consommer, de posséder et de produire sans égards ni considération pour la nature, son égoïsme, son indifférence et son absence de respect pour autrui, et tout autre fard dont il use pour (se) cacher sa vacuité, enfin et pour synthétiser, sa faible inclinaison à faire usage de sa raison sont autant de signes cliniques d'un avenir morose.
Nous optons dès lors pour le tourisme communautaire et partons à la découverte de la petite communidad de la Reyna, loin des joyaux naturels désormais pervertis telle l'île d'Ometepe, mais sûrs au moins que l'argent dépensé retombe dans l'escarcelle de ceux qui le méritent.

Nous retrouvons dans ce petit hameau retiré qui survit de la culture du café les linéaments du Pérou. Nous passons une demi-journée à la cueillette. Le plaisir de se rendre utile se transforme plus rapidement que prévu en un sentiment plus laborieux. Nous sommes heureusement récompensés d’un divin gallo pinto, un mets typique d'Amérique centrale qui les comble de fierté (à savoir riz, bananes plantains, flageolets, oeufs). Nous passons encore quelques jours sur les rives du lac Apoyo et contemplons le volcan Masaya. Des profondeurs de son cratère nous parvient le bruit sourd des remous de la lave en fusion, résurgence du Styx dont le rouge tantôt vif profond tantôt couleur cendre nous donne une idée de l’ambiance dantesque qui règne quelques centaines de mètres sous nos pieds. La contrariété suscitée par les 5 minutes autorisées à ce moment de béatitude (quand on sait qu'Audrey a besoin de dix bonnes minutes par photo) altère cependant considérablement notre ravissement.

Le Honduras, ou du moins le champêtre coin de pays que nous traversons en deux jours, en dehors de sa pauvreté évidemment plus marquée, possède la panoplie parfaite d'un état pastoral américain, de pacifiques cow-boys, pâtres et charretiers à la place des red-necks. A l'instar du Nicaragua, les gens sont ici le plus souvent très avenants. Certainement inspirés par la nature environnante, ils vivent paisiblement. Nous nous tenons toutefois à bonne distance de la capitale, pour ne pas défigurer dans notre esprit le séduisant visage de ce pays.

Notre entrée au Salvador est enveloppée de ce même agréable halo de bienveillance des habitants qui tous nous saluent ou nous font cadeau d'un sourire, d'un geste amical et courtois. Les lieux communs sont tenaces et devant une telle gentillesse générale, nous nous joignons à ces autochtones accortes pour déplorer l’injuste réputation dont le pays mérite tant de pouvoir se défaire. Tandis que le Costa Rica, vaste lupanar où touristes et clients ne font qu'un, offre ses charmes et vend son âme, le Salvador, moins gâtée par la nature sans être dépourvu d'atours, se tourne vers de plus chastes inclinations. Plus humble dans ses prétentions, plus noble dans ses mœurs, il nous fait don d'une simplicité touchante et d'une amabilité désarmante dont il ne s'enorgueillit que modestement.

C'est donc dans une quasi allégresse que nous faisons notre première halte à Playa El Cuco. Nous nous noyons avec délectation parmi les touristes et pêcheurs locaux, dans une ambiance chaleureuse et détendue, presque choyés. Les familles nous témoignent un intérêt teinté de saine curiosité. Une affabilité désintéressée qui nous est peu coutumière. 

A La Libertad, nous retrouvons l'ambiance pittoresque des marchés traditionnels que nous affectionnons tant. Nos sens sont à nouveau soumis à rude épreuve au rayon boucherie et poissons tandis que nous nous attardons pour le plaisir des yeux au stand décorations de Noël (ici aussi, Noël débute en novembre).
Notre itinéraire côtier nous emmène ensuite à El Zonte. Nous partageons ce petit bout d'océan avec un couple de perroquets, un énorme iguane et une poignée de surfeurs.
Nous n'avons pour l'heure rencontré aucun touriste hormis ces derniers et Audrey profite des répercussions favorables sur l'humeur de Guillaume. Nous repoussons chaque jour le départ tant nous nous sentons bien dans ce pueblito. Même l'alerte au tsunami ne suffit pas à nous y déloger. Nous nous plaisons à admirer les surfeurs, leurs abdos comme leurs prouesses, sans pour autant nous presser à les imiter. Après presque une semaine de cette lascive, euh... passive contemplation, il nous faut néanmoins nous faire une raison et reprendre la route, direction Guatemala.

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11 mars 2018

Viva Colombia!

Août - septembre 2016

Popayan, énième ville coloniale que nous visitons (brièvement pour le coup) avant d'atteindre San Agustín est notre première destination en Colombie. Alors que nous pensions en avoir terminé avec les chemins de croix, la route se révèle être un long calvaire. Heureusement, les années de pilotage du traclet de Sorniot rendent l'entreprise plus aisée (à moins que ce soit le shoot de café colombien ?). Si l'accès au site n'est pas une sinécure, ce dernier peut se targuer du double argument d'être non seulement le plus important d'Amérique de la période pré-incas mais aussi et non des moindres de ne pas être l'objet de processions de pèlerins. 
Nous décidons d'allier le fun et le culturel (ce qui n'est de fait pas incompatible) et partons à la découverte de cette civilisation à travers plantations de bananes et de café au (triple) galop.
Nos chevaux ont la pêche et s'en donnent à coeur joie. Leur fougue trouble la quiétude du bétail ruminant paisiblement dans les pâturages détrempés que nous chevauchons tels des cow-boys. Une première expérience d'enduro équestre fort appréciée et qui largue peut-être au second plan le côté culturel de la journée.

Au pays de Quintana, la petite reine est roi. Les cyclistes ont ici pour plus fervents supporters les soldats disséminés sur chaque tronçon de route, mitraillette au poing. Heureusement, ces gosses (ils ne doivent avoir guère plus de 20 ans) sont davantage intrigués par notre cuisinière à gaz que par la recherche de quelque stupéfiant dans notre viatique.
A Cali, hace macho calor! L'atmosphère pesante et le peu d'attrait apparent de la ville nous décident à éluder la capitale de la salsa (ou est-ce seulement une bonne excuse pour Guillaume pour ne pas aller danser?). C'est en lieu et place San Cipriano qui obtiendra notre faveur. Nous plongeons en quelques kilomètres en pleine forêt subtropicale à l'orée de la côte pacifique. Cette région peuplée à l'immense majorité de descendants d'esclaves africains est la grande oubliée du pays et de son gouvernement, mais aussi et c'est tant mieux (pour nous) du tourisme. La pauvreté y est plus prégnante qu'ailleurs, les infrastructures rudimentaires. La population, elle, est à l'instar de celle du reste du pays et de son voisin lusophone des plus décomplexée, spontanée et chaleureuse. On y retrouve d'ailleurs le même métissage. Un panel de couleurs sinon sans hiérarchie sociale au moins sans discrimination, contrairement au racisme latent mais bien présent de l'Argentine et du Chili. Pour se rendre dans ce village isolé, une seule solution - ce qui est en même temps son principal attrait - s'enfoncer dans cette immensité végétale à bord d'un brujita, sorte de banquette sur roulette propulsée par une moto montée sur un rail désaffecté. Dépaysement garanti! Tout ici invite à l'oisiveté. La chaleur et l'air saturé d'humidité nous accablent. Nous trouvons du répit dans l'eau claire et rafraîchissante du rio, quand ce n'est pas sur une terrasse animée, une cerveza au bout des lèvres. Durant la nuit, le ciel se déchaîne, comme pour se venger d'un soleil trop insolent et nous châtie d'un orage terrifiant. Le tonnerre, dans son courroux, gronde comme jamais nous en avons été témoins, secouant le sol que la pluie, déversant son fiel, a transformé en lit de torrent.

Puis c’est une belle surprise qui nous attend au retour du parc Cocora. Non seulement nous découvrons le bus WV d’un couple de voyageurs, mais en plus il se trouve que leurs propriétaires sont valaisans (d’adoption, mais nous sommes trop contents pour leur en faire le grief!). Ce sont les premiers Suisses romands que nous rencontrons (les Alémaniques sont par trop représentés !), ce que nous ne manquons pas de fêter autour de quelques berlingots de vin rouge. Nous passons ensuite deux jours ensemble dans une finca (sorte d’hacienda version colombienne) où l’on nous enseigne une matinée durant la culture et l’art du café. A Peirera, nous rendons visite aux enfants de la fondation Moi pour Toi. Le travail accompli par son fondateur et son équipe sur place force l’admiration. Malheureusement ici comme ailleurs, annihiler le problème de la misère sociale est une gageure. Derrière le sourire des enfants souvent orphelins se cachent des parcours de vie et des traitements ineffables mêlant misère, drogue, maltraitance physique ou encore abus sexuel. Jusqu’à 17 ans, ils bénéficient d’un encadrement global et efficient mais qui n’est cependant pas en mesure de leur garantir l'accès aux voies de l’accomplissement personnel, professionnel ou social une fois sur les routes de l'indépendance.

En attendant les retrouvailles d’Audrey et Rachel à Medellin, d’où nous partirons à la découverte des Caraïbes, nous prenons du bon temps dans les environs de Valle de Leyva, entre désert et pâturages bien de chez nous…

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La route qui nous mène au Peñol de Guatapé, saillie rocheuse aux abords de Medellin, parfait mirador sur l'ensemble de lacs qui l'entourent, nous offre un condensé de Colombie. Tandis que sur l'asphalte camions et motos belliqueux s'affrontent sans ménagement mais avec témérité, sur la chaussée, cantonniers et villageois, asphyxiés par les gaz d'échappement ou plus vraisemblablement par le manque d'air et la chaleur étouffante, semblent s'abandonner à la plus grande paresse. Les premiers, fidèles à ce qui ressemble ici à la règle font semblant de bosser tandis que les seconds, somnolant dans leur hamac, gardent un œil diligent sur le flux intarissable de véhicules, des fois qu'on voudrait bien les réquisitionner pour un nettoyage de carrosse ou pour se repourvoir en bananes. L'excitation idiote et suicidaire des uns contraste ici comme dans le reste du pays avec la léthargie chronique des autres.

Nous consacrons ensuite une journée à la visite de la tentaculaire Medellin, fief de feu le très regretté Pablo Escobar. Nous venons d'achever la série qui lui est consacrée et se rendre dans les quartiers où opérait son sanglant cartel est une expérience assez prenante. Abouliques, et par commisération peut-être pour les Colombiens et à plus forte raison pour les voisins pour qui la plaie est toujours ouverte, nous renonçons à la visite guidée de la maison qui l'a vu trépasser, tenue à ce jour par sa famille et son ancien comptable (pour financer des œuvres de charité, je précise). Nonobstant, exception faite des sculptures atypiques de l'artiste natif Botero, le survol des faubourgs se révèle pour nous bien plus intéressant que celui du centre-ville, paradis oppressant du fake.

C'est en la compagnie de Rachel que nous achevons notre découverte du pays. Pour elle, nous avons gardé le meilleur pour la fin, à savoir la côte caraïbe, de Rioacha à Cartagena. C'est dans la moiteur nocturne d'une station-essence de bord d'autoroute connue des routiers comme des moustiques qu'elle se remet (avec une confondante facilité) des sept heures de décalage horaire. Après deux nuits intenables, faisant fi d'une promiscuité certaine, on peut dire qu'elle a fait le pire du meilleur. 
Cartagène et toute la côte avec elle ne sont que dichotomies, terres de contrastes et d'opposition. Ainsi se côtoient fatras et raffinement, misère et opulence, nature et pollution, plages désertes et préservées et tourisme (et consumérisme et bêtise) de masse. Un paradis en enfer ou un enfer au paradis, selon que l’on est touriste ou descendant d'esclaves.

Force est en tous les cas de constater que notre idée sublimée des Caraïbes ne colle pas à la vie bien frugale des pêcheurs qui déjà n’ont plus grand chose à pêcher. La raréfaction des ressources marines, nous la constatons nous aussi, à travers ces petits poissons de corail flottant inertes en surface. Car si subjectivement la température particulièrement élevée de l'eau est des plus appréciée, objectivement ses causes et ses conséquences sont inquiétantes voire dramatiques. Le sort des Indiens et de leurs enfants non scolarisés vivant dans les réserves alentours n'est guère plus enviable. Dans les Caraïbes, tout n'est pas « luxe, calme et volupté », loin s’en faut.

Sûr qu'au beau milieu de tous ces contrastes, Rachel trouvera dans ses valises de la place pour le souvenir de sa complicité avec Miki le singe (mais avec sa sœur aussi), des petits déjeuners et des apéros chips - rhum coca (presque) seuls sur des plages paradisiaques ou encore, si vraiment il en reste de la place, pour celui du sublime banquet et de la délicieuse soirée qui précéda son départ…

A nous maintenant l’exaltation des procédures administratives un zeste absconses à notre goût pour l’envoi de notre véhicule au Panama, dans le tumulte infernal de cette ville, symphonie dysharmonique qui n'est pas sans rappeler à Guillaume l’assourdissante anarchie de l’Inde. Nous ratissons la ville à la course en quête des innombrables documents requis. Des jours durant, larmes de détresse et gouttes de sueur ne font qu'une. Nous venons cahin-caha à bout de ces impénétrables formalités. C'est à présent cinq jours de voilier à travers les îles San Blas qui nous attendent, au terme desquels nous retrouverons notre véhicule pour poursuivre notre périple en Amérique centrale.

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Difficile d'envisager meilleur anxiolytique pour recouvrer la sérénité que cette croisière dans l'archipel des San Blas qui doit nous mener au Panama et par la même mettre un terme à 11 mois de villégiature (doux euphémisme) en Amérique du Sud. C'était sans compter l'apparition simultanée des signes les plus manifestes d'une incommodité immanente au tangage émétique du voilier.

Cet ensemble d'îlots archétypiques des Caraïbes habités par une petite communauté, les Kunas, nous donne l'impression de faire irruption dans une carte postale. Si l'on était tentés de leur envier leur cadre de vie et les quelques avantages que leur confère une vie presque à l'état de nature, leur contact nous donne la juste dimension d'une condition primitive donc fruste de ces isolats (effectivement, quelques familles). Fouler le sable fin et immaculé (de loin seulement), socle de leur habitat, impose à nos yeux (d)éplorés un spectacle particulièrement inique. Cet archipel constitue un filtre à la consommation orgiaque des lointaines cités. Ainsi, alors qu'ils figurent parmi les derniers représentants d'un monde où tout ce qui était fabriqué était biodégradable, leurs plus réguliers contacts avec « la civilisation » ont pris la forme de bouteilles plastiques, paquets de chips et autres couches culottes jetés sans vergogne et venus s'échouer à leurs pieds.

Plus égoïstement, nous avons pu goûter cinq jours durant, en la seule compagnie d’un autre couple à bord de ce voilier, à un parfum de luxe et d’exclusivité apprécié à sa juste valeur.

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11 mars 2018

l'Equateur : changement d'hémisphère

Nous poursuivons notre route en Équateur, toujours en terre andine (la chaîne des Andes prend fin en Colombie). Dans ce pays aussi, le mode de vie et les traditions quechuas demeurent bien prégnantes. Le développement rapide de ses infrastructures (hôpitaux, réseau routier, écoles,...) fait de lui une sorte de Pérou en plus propret, tant la différence avec l'insalubrité des villes et des campagnes péruviennes est frappante. L'instruction, l'éducation et le niveau de vie y sont aussi sensiblement plus élevés. La conscience écologique collective en est certainement l'une des plus visibles émanations. En dépit d'une corruption lancinante, de quelques choix discutables (interventionnisme exagéré, choix du dollar comme monnaie nationale, limitation et surtaxation des importations, impôts considérables, mauvaise gestion des exploitations pétrolières, opérations minières de grande envergure en forêt primaire,...) et des récessions passagères qui en découlent, la tendance est ainsi à la croissance économique et à la diminution de la pauvreté. La politique progessiste du président socialiste Correa - n'en déplaise aux hégémonies capitalistes occidentales - a de fait des répercussions favorables indéniables, érigeant le pays en figure de proue dans les démocraties socialistes d'Amérique latine.

Fin de la digression. L'entrée en matière ne se présente pas sous les meilleurs auspices. La météo déplorable ne nous permet en effet pas de profiter des trésors ornithologiques qu'offre d'ordinaire à ses visiteurs le parc Podocarpus ni de la beauté austère et rustique du parc Cajas. Nous en prenons en revanche plein les mirettes en parcourant les étales aussi colorées que les costumes des marchands et chalands des marchés de Saraguro, Guamote et Saquisili. Le bruit de scies et des coups de haches s'abattant lourdement sur les carcasses des divers bestiaux s'y mélangent aux mugissements désespérés de leurs congénères sagaces quant au sort que leur réservent leurs bourreaux. Nos yeux se détachent rapidement de ce spectacle funeste pour remonter le temps à travers les visages burinés des vieillards usés ou rencontrer ceux, amusés, des jeunes locaux. Nos narines ne sont pas en reste et sont même mises à rude épreuve. Les odeurs se succèdent sans crier gare de la plus délectable à la plus repoussante, les contraignant à un qui-vive constant mais nécessaire à la prévention de toute réaction physiologique malencontreuse.

De Cuenca, ville touristicoloniale jusqu'à Quito, ce sont les volcans qui occupent le haut de l'affiche. Nous grimpons le flanc du Chimborazo, connu pour être le sommet le plus élevé au monde malgré ses 6268 mètres, tenant compte de la forme légèrement aplatie de notre planète au niveau des pôles et rembourrée à l'équateur. Ce qui nous amène au nom donné à ce pays qui n'a évidemment pas l'exclusivité de la ligne imaginaire. Cela s'explique tout simplement par le nombre élevés de montagnes de haute altitude qui ont permis de prendre les mesures nécessaires à sa définition.
Le soir, nous nous concoctons une savoureuse fondue aux fromages suisses (on y croit, on y croit!), que  nous transformons rapidement, par commodité, en une véritable raclette.
Au matin, nous marchons jusqu'au refuge Whymper à 5100m d'altitude. Nous n'avons cependant pas le mérite de ce dernier qui le premier gravit son sommet en 1880 (et au vu du parterre de stèles dédiées à chaque alpiniste décédé de part et d'autres du chemin, il fallait en avoir!), le van nous conduisant bien confortablement jusqu'à 4800m.
Mais le temps est exécrable, à l'image de l'humeur de Guillaume qui ne possède pas la sagesse stoïcienne d'Audrey et qui est en proie à une frustration qu'il peine à contenir. Nous poursuivons envers et contre tout notre pèlerinage sur la route des volcans. Et notre abnégation finit par payer (où sont-ce les supplications de Guillaume qui ont trouvé résonnance?) et se voit gratifiée entre le Cotopaxi et le lac volcanique Quilotoa de magnifiques paysages andins.

Nous parvenons enfin à Baños, point de départ de notre excursion en forêt amazonienne. En lieu et place des bains volcaniques auxquels la ville doit son nom mais desquels nous sommes gentiment blasés, nous optons pour une randonnée à cheval plutôt sportive pour le plus grand bonheur d'Audrey.

Après s'être ingurgité les 7 Rocky d'affilée, nous décidons tout enthousiastes (pour combien de temps?) d'insérer une séance de fitness dans notre programme quotidien, découvrant par la même une source d'inspiration à priori insoupçonnée.
La veille de notre départ pour les Galapagos, à l'heure du coucher, le bus se met à tanguer ostensiblement. Imaginant là l'oeuvre d'un individu malintentionné, Guillaume, oubliant sa peur, encore sous l'effet Rocky et plus déterminé que jamais à protéger son Adrienne, se précipite à l'encontre de l'intrus, prêt à en découdre. Mais aussi loin qu'il lui est donné de voir dans la pénombre, rien à l'horizon. Nous nous endormons aussi perplexes que peu rassurés. La clé du mystère nous sera délivrée au réveil. Un séisme de 6.2 a à nouveau secoué l'Equateur...

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Passé les réticences du recours à quelque prestataire de services, nous nous laissons donc séduire par les charmes si singuliers de l'Amazonie. Quatre jours dans le parc national Yasuni en pleine forêt tropicale amazonienne sont programmés, accompagnés d'un guide, indispensable en terrain si hostile. Nous faisons route jusqu'à Coca, là où les embarcations prennent le relais des véhicules.
Les Andes ne sont pourtant pas loin mais nous changeons en trois coups de volant d'ambiance, de décor et de température! En chemin, nous faisons halte pour la nuit à Puerto Misahualli, antichambre de l'Amazonie. Il se trouve qu'on est dimanche et nous sommes donc très vite assaillis par les enfants du village. Dans une sorte de réflexe espagnol, nous nous en servons pour laver notre voiture. Dans un registre moins léger, ils nous confient que faute d'argent, ils sont contraints de jeûner les dimanches, figurant certainement parmi les rares écoliers à se réjouir de reprendre le chemin de l'école chaque lundi. C'est donc tout naturellement que nous partageons notre almuerzo avec eux.

La deuxième journée est éprouvante aussi bien physiquement que psychiquement. Nous apprenons à notre réveil qu'un gigantesque éboulement coupe la route que nous devons emprunter, tuant une dizaine de personnes. Nous sommes contraints de faire un détour conséquent, imprévu insignifiant quand on pense que partis trois jours plutôt, nous aurions certainement figuré au nombre des morts. Nous nous pensions à l'abri sur cet autre tronçon mais il n'en est rien. Après quelques kilomètres, nous sommes immobilisés en raison d'un accident mortel. Suite aux pluies diluviennes de ce mois de juin, la montagne dégueule de partout. Nous sommes vraiment tendus. Nous arrivons finalement  à bon port sains et saufs, mais pas au bout de nos angoisses.

Ce n'est en effet qu'une fois à l'entrée du parc que nous prenons conscience que notre entreprise revêt un côté un peu téméraire. Les Huaoranis qui occupent la réserve, autrefois réunis au sein d'une seule et même tribu sont depuis l'arrivée des premiers missionnaires en 1942 et sur fond d'obédience divergente quant à l'accueil à réserver aux compagnies pétrolières aussi bien qu'au tourisme sont divisés en deux clans. Les familles pacifiées (le peuple huaorani est constitué de familles isolées réparties sur un vaste territoire) tolèrent la présence d'autrui tandis que les "sauvages" refusent tout contact avec "la civilisation". Entrer sur le territoire, c'est signer son arrêt de mort. Hostiles et impitoyables, ils ont récemment occis des employés du pétrole et kidnappé deux enfants. Deux mois plus tôt, deux aborigènes qui venaient de ramener des touristes subissaient le même sort funeste. On nous dit donc d'être très prudents. Merci, mais on s'y prend comment exactement? Une intuition subliminale nous invitant à renoncer à cette escapade émerge alors, jusqu'à ce qu'une brochure nous indiquant comment réagir en cas d'attaque nous soit fournie. Suffisait de demander! De plus, les cinq potes grisons qui nous accompagnent étant fraîchement formés de la meilleure armée du monde nous n'avons plus aucune raison de nous faire du mouron. Force est toutefois d'admettre que face à la constitution trapue et musculeuse de ces indigènes, nous ne pesons vraiment pas lourd! Nous découvrons ensuite la pirogue qui doit nous permettre de pénétrer les inquiétants abysses de la forêt échouée au fond du lit limoneux du rio en raison des récentes inondations. Nos biceps sont mis à contribution des heures durant. Notre mauvais pressenti de départ finit de se convertir en véritable axiome. Par esprit de contradiction, nous relevons malgré tout le défi et nous perdons rapidement sous la canopée.

Le soir, nous installons notre campement dans une communauté pacifiée (ai-je besoin de le préciser?). Nous sommes surpris de découvrir des gens vêtus d'habits conventionnels. Ils nous expliquent dans leur langue (ils ne parlent ni espagnol ni quechua, pour n'avoir jamais rencontré ni les uns ni les autres) qu'à l'exception de ceux vivant dans les tribus les plus reculées et sauvages, les indiens d'Amazonie au contact de la civilisation en ont subi l'influence et ne vêtent leurs "costumes" (ou plutôt leur tenue d'Adam) plus que les jours de fête.
Pour autant, quand nous apprenons qu'ils s'entretuent régulièrement à coup de lances et de sarbacanes entre clans ennemis, nous sommes rassurés sur la pérennité de leurs moeurs. On nous fait comprendre que nous réagissons avec notre sensibilité d'occidentaux. Chez eux, la mort d'un être, même le plus cher, n'éveille qu'une émotion aussi contenue que passagère. Après un souper et une veillée autour du feu, nous nous installons dans notre tente où nous attend une tarentule.
Nous réalisons lors de la visite d'une seconde communauté l'indigence dans laquelle ces gens vivent. On nous les décrit, à l'instar de toutes les autres communautés, comme peu intelligents. Nous cherchons à comprendre pourquoi ils ne sont jamais parvenus à évoluer. Il semblerait que dans un milieu si peu disposé à accueillir l'être humain, leur quotidien ne peut qu'être exclusivement dévolu à la recherche - souvent infructueuse - de nourriture. IIs n'ont simplement pas de temps à consacrer à l'instruction, que personne n'est de toute façon en mesure de transmettre. Seule importe la transmission des savoirs prosaïques nécessaires à leur survie (techniques de chasse, de pêche ainsi que des connaissances médicinales). On peut dès lors concevoir que réflexions métaphysiques ou religion ne soient pas au centre de leurs préoccupations.
Puis nous partons à la pêche aux piranhas. Une seule personne de l'équipe (par déduction, pas Guillaume) en pêche un. Ses dents de requin blanc, toute proportion gardée, sont à la hauteur de sa réputation. A la nuit tombée, c'est à la chasse aux caïmans que nous partons. Notre guide, d'un saut habile et leste en attrape rapidement un. Ce n'est pas le crocodile du Nil mais du fait de son agressivité, il nous faut le manipuler con mucho cuidado. Audrey l'apprend à ses dépens. 
Une fois de plus, dauphins de rivière, anacondas et jaguars manquent à l'appel. Pour autant, nous quittons l'Amazonie ravis d'avoir pu vivre une expérience unique, au milieu d'un écosystème sans pareil et au contact de ses fascinantes populations.

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Les Galapagos

Pour cette escapade aux Galapagos, nous sommes rejoints par Émilie. Pour la première fois, nous sommes habités tout au long de notre séjour de cet agréable sentiment d'avoir vraiment une sacrée veine (en plus d'être ici je veux dire!). Ces moments presque euphorisants au contact privilégié de cette formidable diversité d'animaux sont d'autant plus magiques que nous pouvons les partager avec elle. Si nous ajoutons à cela la beauté sans pareille de ces paysages et plages volcaniques, nous pouvons nous prévaloir de vivre le temps d'une semaine un aperçu du paradis.

Après un bref passage au marché traditionnel d'Otavalo histoire pour Emilie de faire le plein de babioles et de se mettre quelques images de la culture andine dans la tête et l'appareil photo, il vient le moment trop tôt arrivé de se séparer. Au terme d'une visite fort appréciée.

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De la Patagonie à l'Alaska
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